Arielle

Je trouve ça étrange... Toute notre vie, toute notre petite vie, on attends.

On attends qu'il se passe de quoi, on espère qu'un météorite de l'imprévu vienne cogner à la porte de notre âme, que le char de l'existence heurte un nid de poule sur l'autoroute du destin et nous fasse changer de trajectoire. On attends. On respire... et on attends. Des mouches viendront bien s'écraser sur le devant de notre bolide, une mouette étendra sa chiure sur le dash ; tant de choses du banal, on espère et on attends toujours. Mais les vrais choses, mon ami, les vrais de vrais choses qui te pogneront aux tripes et te revireront le coeur tout à l'envers, ces vrais choses là, elles se passent dans l'champs. Là où c'est pas encore l'asphalte, là où tu n'as jamais mis les pieds.

Mais t'as peur, ti-gars. T'as encore peur.

On t'as appris qu'il ne fallait pas sortir de la route, on t'as montré le droit chemin, comme ils se plaisent à appeler cela. Ils t'ont mis des menottes sur les méninges, ils t'ont balayé l'effronterie de la tête, et la fougue avec. Ils t'ont dompté sans que tu rechignes. Et comme un innocent, tu les a cru. Oui, tu les a cru. Ils t'ont dis que c'était cela la vie, et tu les a cru. J'peux pas te blâmer, ils nous ont tous dit cela. Mais t'es vieux maintenant, tu peux. Tu Peux avec un grand "p".

Sors.

Fous le camp.

Tu es maître de toi-même.

C'est l'temps.

Ton char peut tomber en panne, ton GPS peut pèter, la route peut finir drette là. Mais toi, TOI. Toi, t'es toujours là, tu peux. Tu peux marcher par toi-même, tu peux aller où tu veux aller, tu peux passer le fossé et t'en aller dans le champs. Tu peux tout foutre en l'air et te faire la vie que TU veux. Sors. SORS!

J'te retiendrai pas plus longtemps.

On est pas domestiqués, t'as la clé de ta cage entre les mains.

Soyons sauvages, ensemble.

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